Depuis les tueries à Charlie Hebdo et porte de Vincennes, le débat sur la
laïcité a pris une ampleur jamais vue en France.
Pourquoi ?
Les hommes sont des êtres sociaux qui doivent vivre ensemble. Ils sont
semblables et différents, uniques et égaux, parmi eux certains croient en Dieu,
d’autres sont athées. Et pourtant tous doivent vivre ensemble. Cette vie
commune qui nous est imposée ou que nous recherchons, que nous souhaitons même
parfois développer, doit nous être également garantie, assurée.
C’est le sens même de la déclaration des
droits de l’homme et du citoyen : assurance à tous de la liberté de
conscience et de l’égalité des droits.
Tel est le sens de notre contrat fondateur apte à fournir le cadre d’un
Etat de droit.
Cette liberté de conscience exclut toute contrainte religieuse ou
idéologique.
L’égalité des droits est incompatible avec la valorisation d’une
croyance religieuse ou la valorisation de l’athéisme. Ainsi on peut résumer ce
premier cadre en une expression : Oui au droit à la différence, non à
la différence des droits.
La puissance publique dont une des
missions est d’organiser notre manière de vivre ensemble sera donc neutre et
indifférente sur le plan confessionnel. Et cette neutralité qui est une garantie
d’impartialité, est aussi la condition pour que chacun, quelle que soit sa
croyance ou ses convictions, puisse se reconnaître dans la cité ou dans la
république, dont tous les membres se trouvent à égalité.
Voilà une première esquisse des principes de laïcité. Esprit de concorde
entre les hommes qui disposent des mêmes droits et reconnaît leur différence.
Ce principe vise à la réalisation d’un objectif qui promeut ce qui unit les
hommes en amont de leur différence spirituelle, religieuse, ethnique,
culturelle.
Ce principe de laïcité exclut tout type de privilège et de communautarisme
et prévient ainsi la violence qui pourrait en résulter. Ce principe exclut tout
type de fanatisme et d’intolérance.
Le but ultime de la
laïcité est bien le maintien et le développement de la paix, de l’égalité et de
la fraternité entre les hommes ; des hommes qui deviennent alors des êtres
de droit, des citoyens.
La question de la laïcité est aujourd’hui d’une brûlante actualité dans le
monde et aussi en France. La question peut se résumer ainsi : Comment
vivre les différences entre les hommes sans renoncer au partage des références
communes ?
Question d’autant plus importante lorsque aujourd’hui en France la
différence et le pluralisme des convictions peuvent dessiner des communautés
exclusives, dont les membres sont aliénés à leur différence avec le risque
d’affrontement communautaire que l’on peut très bien imaginer.
Voilà un des enjeux actuels de la laïcité. Nous assistons dans notre pays à
une montée des communautarismes qui s’opposent à la notion de citoyenneté. Car
c’est en tant qu’homme et citoyen que les personnes ont des droits et non en
tant que communauté.
Une telle esquisse du principe de laïcité prend la forme d’une
évidence : ce qui n’est que de certains ne peut s’imposer à tous.
Pour être acceptée, une telle évidence requiert deux conditions
simultanées :
- d’une part elle
exige que la puissance publique soit dévolue à tous et mette ainsi en
avant ce qui unit les hommes,
- d’autre part
elle implique que chacun apprenne à vivre la croyance qui lui tient à cœur
de façon à
en exclure fanatisme et intolérance.
Ainsi c’est la possibilité et la volonté
de vivre dans un monde commun à tous qui est en jeu.
La laïcité n’est neutralité et réserve
qu’en raison de l’esprit de concorde qui la définit de manière positive dans
ses principes.
C’est un principe fondateur.
C’est un
principe d’unification des hommes.
François Baudin