A l’occasion de l’attentat contre
Charlie et des morts de Vincennes, la France, surprise, a appris que certains
détenus français ressortaient de prison beaucoup plus dangereux pour la société
qu’ils n’y étaient entrés. A chaque fois la découverte de ce terrible constat
semble déconcertante pour la plupart d’entre nous.
Victor Hugo, faisait déjà le même
constat il y a 160 ans.
Les assassins de Charlie et de
l’hyper Casher de Vincennes se sont radicalisés en prison. Ils en sont sortis
plus menaçants.
Victor Hugo, dénonçait le fait
que la prison au XIXe siècle était une façon de gérer la
pauvreté qui sévissait dans les quartiers populaires des grandes villes. La
prison est le meilleur moyen pour devenir un vrai criminel. Classe laborieuse,
classe dangereuse. Classe miséreuse, classe dangereuse. Ce constat est toujours
d’actualité aujourd’hui. Enfermez les pauvres, telle semble être la solution
pour la plupart des hommes politiques de notre époque.
Dans son dernier rapport d’avril
2014, le Contrôleur général des prisons, Jean-Marie Delarue soulignait la
surpopulation carcérale, les violences subies par les détenus mineurs,
l'absence de progrès dans le respect du droit à une cellule individuelle, les
conditions d’hygiène inhumaines et indignes de la France. Ce constat terrible
qui mettait une fois de plus notre pays sur le banc des accusés en Europe.
Les prisons en France sont une
honte pour l’humanité.
Par exemple en 2013, notre pays a
été condamné par la Cour européenne des droits de
l'homme pour « traitement
dégradant », en raison des conditions de détention dans la maison
d'arrêt de Nancy fermée en 2009.
Pour le
sociologue Didier Fassin, la prison, est l’« ombre du monde » et elle est « mode de gouvernement des inégalités ». En prison on enferme
plus facilement les pauvres, ceux qui viennent des ghettos, des territoires
d’exclusion. Les statistiques le prouvent. L’accroissement de la population
carcérale s’explique par une plus grande sévérité des magistrats. La comparution
immédiate suivie de peines d’enfermement devient une pratique courante et
expéditive.
Les
délits qui donnent lieu à de la prison ferme sont caractéristiques des milieux
populaires : conduite sans permis, trafics divers, usages de stupéfiants,
petites délinquances ; les condamnations pour usage de stupéfiant ont
augmenté de trois fois et demie au cours de la dernière période alors que les
affaires de nature financière sont de moins en moins traitées et sanctionnées.
On sait
que lorsque la crise s’aggrave, lorsque les inégalités sociales frappent un
pays, la population enfermée derrière les barreaux, notamment les jeunes,
augmente. Il est prouvé statistiquement qu’a délits identiques, la justice aura
tendance à condamner plus lourdement un jeune issu des quartiers populaire,
qu’un autre venant des classes moyennes ou aisées.
La
détention de drogue ou la conduite sans permis est répandue dans tous les
milieux sociaux. On n’enferme pas facilement les fils de famille, mais on
interpelle les jeunes des cités, explique Didier Fassin. La prison reproduit et
renforce les injustices et les inégalités sociales.
Tant
qu’on n’aura pas réfléchi à notre politique carcérale, tant qu’on n’aura pas
défini la place qu’occupe la prison dans notre société, tant qu’on n’aura pas
questionné la banalisation actuelle de l’enfermement, on ne pourra pas résoudre
les maux dont souffre notre pays. Maux que le drame de l’attentat contre
Charlie et l’attaque du super marché Casher de Vincennes illustre parfaitement.
La prison ne rend pas meilleurs
les individus, au contraire. Ils en sortent plus dangereux qu’en y entrant.
Pourquoi alors insiste-t-on autant
ces derniers jours pour y enfermer encore plus de jeunes ?
Pourquoi persiste-t-on autant
dans l’erreur ?
Y a t il d’autres solutions que
la prison ?
Telles sont les questions qui
nous sont aussi posées en ce début 2015.
François Baudin
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