Du pain et des jeux (2)
Le football réunit et passionne
des milliards d’individus. Il n’existe aucun sport équivalent capable de donner
autant de joie au plus grand nombre.
Le football est probablement
aussi le sport qui draine le plus d’argent dans le monde : des milliards
et des milliards sont échangés pour assister aux matchs, au spectacle, voir sur
les écrans des télévisions les vedettes du ballon rond courir pendant 90
minutes.
L’argent coule à flot des grandes
entreprises multinationales pour sponsoriser une équipe ou une compétition.
L’argent s’échange par milliards
pour parier sur une équipe contre une autre. La corruption, le dopage, la
triche règnent en maître.Les compétitions internationales
sont des zones de non droit.
Le système sportif prend
singulièrement l’odeur des égouts, des bas fonds, de la mafia. L’odeur de
l’argent.
L’Euro de foot débute cette
semaine en France. Mais sera-t-il placé sous le signe de la fête ?
Pour celui, conscient du système
corrupteur qui triomphe dans le sport, probablement pas !
Mais la fête doit avoir lieu
malgré tout. Du pain et des jeux comme divertissement. Le gouvernement est même
prêt, face aux grèves qui risque de perturber la compétition, à réquisitionner
les grévistes. Ces réquisitions seront-elles légales ? Le droit de grève
devra-t-il reculer face à l’impératif ludique ?
Il faut que les jeux aient lieu.
Il faut oublier, se divertir d’un monde difficile, un monde qu’un grand nombre
ne veut plus. L’expression d’origine latine, du pain et des jeux, dénonce la
domination de tous les pouvoirs sur les populations par le spectacle du cirque.
Le jeu dans ces conditions peut être à juste titre considéré comme l’opium du
peuple, afin de calmer les populations, d’endormir les individus et d’annihiler
ainsi toutes volontés de changement et de justice.
Une manière qu’on qualifierait
aujourd’hui de démagogique ou de populiste ; une façon d’asseoir et faire
durer tout pouvoir en place.
Le sport est un révélateur de nos
mœurs. Un révélateur de notre société dominée par l’argent. Dominée aussi par
les idées identitaires et nationalistes. L’affaire Benzema en est la preuve
puisque le débat sur la constitution de l’équipe de France a porté sur cette
question du racisme et de la xénophobie. Sur cette question de la haine des
banlieues d’où viennent la plupart des joueurs.
Comment faire pour que le sport
devienne ce qu’il devrait être : un partage, une joie, la réalisation et
le dépassement de soi, individuellement ou collectivement.
Pour atteindre cette finalité de
haute valeur morale, l’argent doit absolument être interdit des stades et des
épreuves.
Le scandale dans le football
mondial, comme celui de l’organisation des jeux olympiques, comme celui du
cyclisme, sont un signe des temps ; signe d’un monde en décomposition. Seul
un contrôle démocratique pourra remédier aux errances du sport et à ses
malversations.
Le problème du sport est
politique, économique et social. Cette semaine, cela est plus qu’évident.
Cette question du sport nous
concerne tous, car il s’agit probablement d’une des plus belles activités
humaines, joyeuse et gratuite, qui a été diaboliquement détournée et
transformée en son contraire.
François Baudin
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