Il
apparaît évident que le retour de la question sociale en France et aussi dans
d’autres pays d’Europe, comme actuellement en Belgique où un puissant mouvement
contre la réforme du droit du travail est en cours, chasse à l’arrière plan les
débats sur l’identité, la sécurité, le terrorisme ou la fanatisme religieux.
Débats qui font le lit des mouvements xénophobes, racistes, comme des votes
extrémistes et démagogiques.
Car le repli identitaire, le danger terroriste, la tentation du fanatisme ne
sont tout compte fait que des symptômes ou des conséquences des difficultés
économiques et sociales qui traversent le monde contemporain.
Un
peu comme si toutes ces questions liées à la sécurité et à l’identité,
n’étaient là que pour cacher l’essentiel qui est la cause de tous les maux
actuels. L’essentiel se nomme la pauvreté grandissante en Europe, l’abandon de
pans entiers de la société, de régions entières, l’exclusion d’une partie de
plus en plus importante de la population quelle que soit son origine et quel
que soit le pays concerné ; l’essentiel se nomme l’exclusion sociale, la
précarité placée comme horizon indépassable pour la jeunesse comme pour
d’autres catégories des populations.
La
question sociale qui touche une partie importante des habitants de nos régions
européennes, a le mérite, si nous en prenons conscience, de nous ouvrir vers un
autre horizon, au-delà de nos propres frontières, de nos différentes nations.
Car les mouvements sociaux qui se présentent en Allemagne, en Angleterre, en
Espagne ou en Italie, sont les mêmes que les nôtres, ils ont les même causes :
précarité, régression sociale, chômage, absence de droits, ou bien volonté
manifeste de les diminuer encore au nom d’une rentabilité économique toujours
plus pressante.
Dès
qu’on parle social, condition de vie et condition de travail, immédiatement une
forme d’universalité s’ouvre à nous. L’horizon international, celui qui nous
fait penser que les hommes sont tous pareils au-delà de leur différence et de
leur nationalité, est le plus souvent ouvert par la question sociale.
Dernièrement
un sondage commandité par le journal La
Croix rappelait que les Français aimaient la politique, s’y intéressaient,
alors que beaucoup de commentateurs pensaient que la politique était morte.
Mais
de quelle politique s’agit-il ? Probablement pas de la politique
politicienne qui est de fait massivement rejeté par les gens. Les taux recors
d’absentions à chaque élection sont bien là pour nous le dire. Non si les
Français aiment la politique, s’ils ont le désir de la politique, c’est plutôt
de cette passion de l’engagement dont il est question. Engagement en direction
de ce qui les meut au plus profond : une aspiration a vivre autrement face
à un contexte social difficile constitué de galères permanentes, de difficulté
de vivre. Et justement les débats autour de la loi travail et les différentes
mobilisations que cette loi a provoquées, sont des puissants moteurs de ce qui est l’essence même du politique : comment nous organiser autrement ? Comment résoudre collectivement nos difficultés ? comment construire une autre
démocratie plus participative et plus directe ; une démocratie qui tienne
compte des réalités vécues par une majorité de citoyens ?
C’est
bien un besoin de ré-enchanter la politique qui s’exprime actuellement dans
les Nuits debout, comme à travers les milliers d’initiatives qualifiées parfois
de citoyennes, qui est aujourd’hui à l’ordre du jour.
La
lente descente historique et pluri décennale qui s’est caractérisée par l’égoïsme,
le calcul froid, le triomphe de l’intérêt individuel, l’ultra libéralisme et le
repli identitaire, semble terminée. On a l’impression qu’un autre cycle se met
en route dans le monde entier.
En
France, les récentes mobilisations contre le projet de loi El Khomri ont
peut-être remis les choses dans un autre sens.
La
politique est morte, vive la politique.
François
Baudin
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