Au Brésil, les manifestations
contre l’organisation de la coupe du monde sont quotidiennes depuis des mois
Une partie du peuple brésilien dont
on disait qu'il avait pour toujours sacré de manière quasi religieuse le
football, refuse la compétition. Le roi ballon est aujourd’hui un roi déchu.
Jour après jour, les manifestants
sont de plus en plus nombreux pour critiquer les sommes abyssales dépensées, les
dépassements astronomiques des coûts des travaux, la gabegie financière, la
corruption, alors que la santé des populations, l’éducation des enfants, les
logements des familles sont dans un état déplorable. Alors qu’une partie de la
population brésilienne vit dans la misère des favelas.
On avait prétendu que les investissements
nécessaires pour accueillir l’évènement sportif allaient permettre le
développement du pays. Il n’en est rien.
La croissance économique n’est
pas au rendez-vous, l’inflation, notamment l’inflation immobilière, comme celle
des produits alimentaires et des tarifs des transports, plonge les Brésiliens
dans de grandes difficultés. Très peu pourront assister aux matchs, dont les
prix des billets sont prohibitifs. Les temples du foot seront de fait interdits
au peuple.
Au total la coupe du monde aura
coûté 11 milliards de dollars aux contribuables brésiliens. Beaucoup ont estimé
que les effets du Mondial sur l'économie seront insignifiants, voire négatifs.
Cette semaine des heurts violents ont éclaté entre les
manifestants et les forces de police : à Sao Paulo, à Rio, et surtout à
Belém où était a été exposé le trophée du Mondial.
Cette même semaine les policiers de 14 Etats, dont 6
accueillent le Mondial, annonce une grève pour revendiquer de meilleurs
salaires.
En fait des mouvements sociaux touchent de nombreux secteurs
de l’économie, qui disent tous la même chose : on a besoin de nourriture,
pas de football.
Cette semaine encore la
déclaration malheureuse de Michel Platini a mis encore un peu plus le feu aux
poudres : pour le patron de l’UEFA, les Brésiliens doivent se calmer et
attendre la fin de l’épreuve pour revendiquer. Il appelle les Brésiliens à la
retenue le temps du Mondial.
Michel Platini peut-il se
permettre de donner ainsi des leçons ?
Pour lui comme pour de nombreux
organisateurs de manifestations sportives, la coupe du monde comme les jeux
olympiques, comme toutes autres compétitions sont au-dessus de la mêlée, au-dessus
de toute activité humaine, alors qu’elles en sont d’une certaine façon le
miroir et le révélateur.
Cette manière d’insulter le
peuple brésilien n’a pas été du goût de tout le monde.
Eric Cantonna, héros du stade de
Manchester United, ne s’est pas fait attendre pour répondre à Platini.
Connu pour son franc-parler, King
Eric a reproché à Michel Platini son indifférence à l’égard de la misère
humaine, de la misère brésilienne.
"Platini attend que la Coupe du Monde se passe bien, mais des gens ont
juste besoin d'être entendus, et ils seront entendus grâce à la Coupe du Monde,
leurs revendications portent depuis plusieurs mois, dans le monde entier, parce
qu'il y a cette épreuve ! C'est un point positif. Evidemment qu'ils vont
profiter de la Coupe du Monde, ils ne vont pas attendre qu'elle passe, comme
Platini le demande, ça ne servirait à rien",
a répondu Eric Cantonna.
Voilà un échange de balles entre
Cantonna et Platini qui montre que le foot comme tout autre activité humaine
est pour chacun un révélateur du regard que l’on porte sur le monde.
François Baudin
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