vendredi 23 mai 2014

Le Brésil contre le Mondial de foot.


Au Brésil, les manifestations contre l’organisation de la coupe du monde sont quotidiennes depuis des mois

Une partie du peuple brésilien dont on disait qu'il avait pour toujours sacré de manière quasi religieuse le football, refuse la compétition. Le roi ballon est aujourd’hui un roi déchu.
Jour après jour, les manifestants sont de plus en plus nombreux pour critiquer les sommes abyssales dépensées, les dépassements astronomiques des coûts des travaux, la gabegie financière, la corruption, alors que la santé des populations, l’éducation des enfants, les logements des familles sont dans un état déplorable. Alors qu’une partie de la population brésilienne vit dans la misère des favelas.

On avait prétendu que les investissements nécessaires pour accueillir l’évènement sportif allaient permettre le développement du pays. Il n’en est rien.
La croissance économique n’est pas au rendez-vous, l’inflation, notamment l’inflation immobilière, comme celle des produits alimentaires et des tarifs des transports, plonge les Brésiliens dans de grandes difficultés. Très peu pourront assister aux matchs, dont les prix des billets sont prohibitifs. Les temples du foot seront de fait interdits au peuple.
Au total la coupe du monde aura coûté 11 milliards de dollars aux contribuables brésiliens. Beaucoup ont estimé que les effets du Mondial sur l'économie seront insignifiants, voire négatifs.

Cette semaine des heurts violents ont éclaté entre les manifestants et les forces de police : à Sao Paulo, à Rio, et surtout à Belém où était a été exposé le trophée du Mondial.
Cette même semaine les policiers de 14 Etats, dont 6 accueillent le Mondial, annonce une grève pour revendiquer de meilleurs salaires.
En fait des mouvements sociaux touchent de nombreux secteurs de l’économie, qui disent tous la même chose : on a besoin de nourriture, pas de football.

Cette semaine encore la déclaration malheureuse de Michel Platini a mis encore un peu plus le feu aux poudres : pour le patron de l’UEFA, les Brésiliens doivent se calmer et attendre la fin de l’épreuve pour revendiquer. Il appelle les Brésiliens à la retenue le temps du Mondial.

Michel Platini peut-il se permettre de donner ainsi des leçons ?
Pour lui comme pour de nombreux organisateurs de manifestations sportives, la coupe du monde comme les jeux olympiques, comme toutes autres compétitions sont au-dessus de la mêlée, au-dessus de toute activité humaine, alors qu’elles en sont d’une certaine façon le miroir et le révélateur.
Cette manière d’insulter le peuple brésilien n’a pas été du goût de tout le monde.
Eric Cantonna, héros du stade de Manchester United, ne s’est pas fait attendre pour répondre à Platini.
Connu pour son franc-parler, King Eric a reproché à Michel Platini son indifférence à l’égard de la misère humaine, de la misère brésilienne.
"Platini attend que la Coupe du Monde se passe bien, mais des gens ont juste besoin d'être entendus, et ils seront entendus grâce à la Coupe du Monde, leurs revendications portent depuis plusieurs mois, dans le monde entier, parce qu'il y a cette épreuve ! C'est un point positif. Evidemment qu'ils vont profiter de la Coupe du Monde, ils ne vont pas attendre qu'elle passe, comme Platini le demande, ça ne servirait à rien", a répondu Eric Cantonna.
Voilà un échange de balles entre Cantonna et Platini qui montre que le foot comme tout autre activité humaine est pour chacun un révélateur du regard que l’on porte sur le monde.


François Baudin 

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