Au
cours des derniers jours, deux évènements se sont télescopés telle une
dissonance symbolisant la marche du monde. La 102ème journée
internationale du migrant et du réfugié organisée par le Vatican et la 45ème
rencontre de Davos en Suisse.
Les
premières journées internationale organisées par l’Eglise catholique dès avant la guerre de
1914 étaient principalement consacrées à la question des migrations italiennes
à travers le monde et à l’accueil, le plus souvent hostile, que ces populations
recevaient dans les pays européens comme aux Etats-Unis. En butte à la
xénophobie, à des conditions très pénibles, effectuant les tâches les plus
dures, confrontées à une vie dégradante, logeant dans des taudis et des
baraquements de fortune, les premières migrations humaines industrielles
n’avaient rien à envier à celles d’aujourd’hui.
Depuis
les premiers temps de l’histoire de l’industrie moderne, comme s’il y avait une
continuité historique dans les migrations, des centaines et des centaines de
millions d’individus ont été déplacés pour y peupler les usines, les mines, les
baraquements insalubres où des hommes devaient reconstituer leur force de
travail.
Aujourd’hui
la situation des migrants n’a guère changé. Peut-être même a-t-elle empiré et
très fortement augmenté ?
Jungle
de Calais où viennent souffrir dans la boue, sous les tentes et dans le froid,
des hommes, des femmes et des enfants.
Frontière
serbe, autrichienne ou tchèque où marchent péniblement dans la neige de longues
files d’êtres humains, fantômes de notre monde contemporain.
Frêles
embarcations sombrant corps et biens au large des côtes grecques, espagnoles ou
italiennes.
Voilà le spectacle quotidien
offert par notre planète.
Le Pape
sur la place Saint Pierre de Rome a rappelé dimanche dernier qu’à la racine de
l’Evangile se trouve l’accueil. Voir et répondre à la misère du monde est un
commandement impératif. Le pape François déclare : Plus que par le passé, l’Évangile de la
miséricorde secoue aujourd’hui les consciences, empêche que l’on s’habitue à la
souffrance de l’autre et indique des chemins de réponse qui s’enracinent dans l’espérance de la
charité.
Un
second évènement est intervenu : les rencontres de Davos en Suisse. Le forum économique mondial qui réunit
chaque année depuis 1971 en janvier des dirigeants de grandes compagnies
mondiales, des responsables politiques du monde entier, des intellectuels et
des journalistes, afin de débattre des problèmes les plus urgents de la planète.
Donc une rencontre de ceux qui ont aujourd’hui le pouvoir de décider, qui d’ailleurs
prennent des décisions chaque jour et conduisent de fait la marche du monde.
Qui sont, même pour certains d’entre eux, élus pour cela, pour décider. Qui
sont nos représentants.
Or
la question est bien là ?
Comment
se fait-il qu’une même situation humaine perdure depuis presque deux
siècles ? En empirant, nous dit le pape François dans sa déclaration. N’y
a-t-il pas là un scandale historique qui devra bien un jour être véritablement
combattu et dont nous sommes en définitive collectivement responsables ?
N’y
a-t-il pas un extraordinaire aveuglement humain qui nous fait toujours chuter
dans le calcul froid et égoïste de l’unique et impitoyable liberté du système économique
actuel qui produit selon le dernier rapport de l’ONG Oxfam, des inégalités monstrueuses
jamais connues auparavant dans l’histoire de l’humanité.
L’homme
restera-t-il toujours le moyen pour qu’un autre homme puisse s’enrichir ?
L’homme
sera-t-il un jour considéré dans l’entièreté de sa personne, respectée comme
tel, comme une fin et non comme un moyen ?
Nous
sommes confrontés à un défi permanent qui nous impose depuis si longtemps de
penser ensemble à un autre monde possible, à une autre humanité. Seule la
perspective d’un autre possible, redonnera espoir à la famille humaine.
François
Baudin
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