vendredi 8 novembre 2013

Les biens nommés "343 salauds".



Les biens nommés "343 salauds".
Une proposition de loi contre la prostitution est actuellement en cours de rédaction au parlement. Elle vise à défendre la dignité de la personne humaine et va bien au-delà des clivages politiques habituels puisqu’elle est soutenue par des hommes et des femmes de droite et de gauche.
Il s'agit de « lutter contre les réseaux mafieux de la traite humaine », « épargner aux jeunes l'entrée dans la prostitution », « accompagner les personnes prostituées et les aider à en sortir » ; et surtout, et ce qui est nouveau, elle propose de responsabiliser les clients et d’interdire « l'achat d'un acte sexuel», en créant une amende de 1.500 euros pour tout client d’une prostituée.  Le délit de racolage public serait abrogé.
Ce texte est donc très novateur et courageux car il renverse la position traditionnelle du législateur qui sanctionne la prostituée et dédouane le client.
La prostituée est ainsi considérée comme une victime, ce qu’elle est en fait, alors que le client est enfin culpabilisé. Le texte se fonde donc sur une conception de la dignité de la personne humaine face à la violence que constituent la traite des êtres humains et la prostitution.

Cette semaine, une pétition a circulé : intitulée « Touche pas à ma pute ». Elle a été signée par quelques personnalités hyper médiatisées qui se qualifient eux-mêmes de « salauds », et revendiquent le droit d’aller voir des prostituées sans être pénalisés par la loi.
Cette pétition a provoqué un véritable scandale en France.

Qu’est ce qu’un « salaud » ?
Il est difficile de dire de quelqu’un que c’est un salaud. Car qui peut juger, qui est en droit de juger ?
Le « salaud » est un homme méprisable, moralement répugnant, motivé par son unique intérêt et prêt parfois à commettre les pires choses pour arriver à ses fins.
Mais cette définition du salaud n’est pas suffisante, car en plus d’avoir un comportement inacceptable, le salaud selon Jean Paul Sartre se caractérise par le fait qu’il est conscient de ses actes et les revendique en toute liberté, et après y avoir réfléchi décide de manière responsable et assumée de les promouvoir, d’en faire une règle de vie.

Le vrai salaud alors n’est pas celui qu’on désigne, mais il est celui qui s’affirme comme tel.
Ce type d’individu est rare, car dans la plupart des cas, les gens cachent aux autres leurs turpitudes, leurs actes moralement répréhensibles. Mêmes s’ils ont conscience d’être peu recommandables sur certains points de leurs actes, ils ne peuvent les revendiquer.

Dans le cas de la prostitution, les personnalités qui revendiquent haut et fort le fait d’être des clients sont donc réellement des salauds, ils le savent et ils le disent.
Ils savent qu’ils contribuent à l’esclavage, qu’ils contribuent au trafic de femmes, à la traite humaine. Rappelons qu’en France plus de 85 % des prostituées sont de jeunes femmes venues contraintes et forcées.
Les  femmes prostituées sont toutes originaires de pays très pauvres. Elles sont arrivées en Europe par le biais d’organisations criminelles. Elles sont des « esclaves » victimes de proxénètes ayant profité de leur vulnérabilité pour les tromper et les placer sur les trottoirs dans des conditions particulièrement éprouvantes. Ces mafias, réseaux et filières, sont généralement particulièrement violents, peu scrupuleux et avides de gains rapides.

Cette forme d’esclavage, d’asservissement, n’est pas acceptable et il est temps que les hommes qui en profitent et dont certains se considèrent eux-mêmes comme des salauds, soient pénalisés. 

François Baudin

1 commentaire:

  1. Personnellement, j'ai trouvé deux article très intéressant sur le sujet, qui prennent des positions assez différentes de celle défendue par François, l'auteur de la chronique.
    L'article du journal le monde de Nathalie Heinich
    Elle souligne que les questions de la traite de être humain et de la prostitution des mineurs sont déjà encadrées par la loi. La prostitution des mineurs est déjà pénalisée, et rappelle avoir proposé un encadrement de la prostitution.

    L'autre article vraiment excellent m'a été conseillé par une amie féministe
    il est écrit par Marie-Anne Paveau critique le manifeste et montre en quoi, rien ne tient debout dans ce morceau de prose signé par "des salauds"... et bien peu
    dans les réactions qu'il a sollicitées. Elle critique entre autre dans sa conclusion la fause croyance que “la vertu ne sauvera pas les prostituées”,

    Elle termine ainsi "C’est que le problème est ailleurs sans doute. De 1971 à 2013, le même problème se pose, qui n’est pas forcément d’ordre moral ou social, mais d’ordre politique-sexuel : que le corps des femmes (et des dominé.e.s, femmes étant ici pour moi une sorte de désignant générique de la domination) échappe au contrôle des hommes est toujours un point critique. Et les revendications des putes mettent le doigt [...] dans le chaudron du patriarcat, là où ça fait mal aux dominants.

    les deux liens :

    http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/11/07/prostitution-un-projet-de-loi-culpabilisant_3509371_3232.html

    http://penseedudiscours.hypotheses.org/490

    cordialement
    Vincent

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