Comment
allons-nous sortir du piège dans lequel nous sommes ? Comment peut-on
arrêter cette mécanique dont chaque pièce contribue à faire avancer l’autre,
tel un engrenage mortifère ? Comment pourra-t-on sortir un jour de l’état
d’urgence ?
Il est
sûr qu’on ne pourra pas en sortir aussi facilement qu’on y est entré. Le débat
qui commence actuellement en France sur la légitimité de cet état d’exception débute
seulement alors que ceux qui gouvernent s’interrogent sur la manière de le
prolonger au delà du 16 février 2016. Car il est bien évident que les menaces
d’autres attentats seront toujours là en France au-delà de cette date.
Les
guerres multiples qu’on mène sur des théâtres extérieurs et dont les dirigeants
occidentaux sont en grande partie historiquement responsables, n’auront pas
cessé. Les avions français, britanniques, russes ou américains continueront de
mener leurs bombardements provoquant aussi la mort de milliers de civils sur
des zones où nous avons contribué collectivement à détruire les Etats.
En
France, la question de la pauvreté et des banlieues, ces zones de relégation et
d’exclusion, sera toujours la question essentielle qu’on est incapable de
régler de manière juste et démocratique.
Et
justement l’état d’urgence est destiné en priorité à ces territoires français
et aux populations qui y habitent. Car c’est bien là qu’il s’exerce. L’état
d’urgence est ciblé à l’intérieur dans ces zones de relégation, comme nos
bombardements qu’aucune décision onusienne n’a autorisé, sont ciblés à l’extérieur
dans des zones où les Etats ont disparu.
L’état
d’urgence en France, qu’est-ce que c’est ! Pour beaucoup de Français cela
semble anodin, car une grande partie de la population n’en souffrira pas
directement. Comme avant, les Français se sentiront des citoyens libres qui pourront
sortir le soir entre amis, aller travailler, se promener dans les galeries
marchandes et y consommer. La vie quotidienne ne changera pas pour eux. Et en
plus ils auront le sentiment d’être protégé tout en ayant maintenu leur liberté
individuelle. En conséquence, aucun gouvernement ne souhaitera supprimer l’état
d’urgence dans un avenir plus moins proche.
Par
contre, une autre partie de la population est sous une surveillance étroite. Il
s’agit des étrangers, des musulmans, des réfugiés, immigrés, des pauvres, des
exclus qui sont maintenant soupçonnés des pires crimes avant même d’avoir pu se
défendre. Car l’état d’urgence ôte toute possibilité de défense possible.
L’état d’urgence étant par définition un système de répression qui peut se
passer de la justice pour prendre ses décisions. L’état d’urgence est toujours
une atteinte à l’état de droit.
Et
c’est bien ainsi que cela se passe. Les premières atteintes au droit et à la
liberté individuelle ont déjà eu lieu : perquisitions violentes, abus des
assignations à résidence provoquant des impossibilités de travailler,
licenciements, enfermements abusifs…
Le site
internet qui se nomme la quadrature du
net, a déjà listé de centaines d’abus et de dérapages liés à l’état
d’urgence.
Le
virage social attendu depuis tant d’années est de moins en moins à l’ordre du
jour. Les quartiers laissés à l’abandon ne seront plus que des zones de
violence et de surveillance.
Par exemple, après l’assaut de la police du 17 novembre à
Saint-Denis, contre le groupe terroriste, l’immeuble totalement détruit a été
vidé de ses habitants. Aujourd’hui les 71 personnes délogées dorment toujours
dans un gymnase, alors que l’Etat est aux abonnés absents.
Pourquoi la solidarité nationale ne fonctionne-t-elle pas
pour ces familles victimes d’une guerre qu’ils n’ont pas voulu.
On ne peut pas être à la fois citoyen et xénophobe ; citoyen
et indifférent, insensible à l’injustice et au rejet qui touchent une partie de
nos concitoyens.
François
Baudin
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