jeudi 15 octobre 2015

Question sur la violence


J’aimerai revenir cette semaine sur la violence de quelques salariés d’Air France contre deux cadres de la compagnie aérienne qui ont du fuir la vindicte ouvrière. Cette violence est le dernier symptôme d’une longue chaîne appelée libre concurrence provoquant des vagues massives de licenciements économiques.
Cette violence ouvrière de la semaine dernière a fait l’objet de nombreux commentaires dans la Presse et parmi les hommes politiques qui stigmatisent les comportements qualifiés de voyous, indignes d’un Etat de droit, indignes d’un pays pacifié où d’autres voies sont possibles pour faire entendre ses revendications.

Il faut rappeler que dans maints conflits récents en France, des actes de violence sont commis. Les dernières manifestations paysannes de cet été nous l’ont encore montré, tout comme celles des Bonnets rouges contre l’écotaxe. Les saccages de biens publics, les nombreux blessés, les violences contre des personnes n’avaient pas à cette époque soulevé autant d’émotion dans la presse et parmi les hommes politiques.
Pourquoi cette différence de traitement ?
Est-ce que la colère des paysans qui se traduit parfois par des actes répréhensibles, est mieux tolérée et en définitive acceptée et même légitimée ?
Est-ce que la violence des salariés est plus grave ?
Qu’est-ce qui fait que d’un côté la violence lorsqu’elle est d’origine ouvrière est immédiatement condamnée, et de l’autre lorsqu’elle vient de petits exploitants agricoles ou d’artisans en bute à des réelles difficultés est plus acceptable ?

L’un, le paysan, défend son bien propre, sa propriété, son outil de travail et cela semble légitimer son acte lorsque tous ses biens sont en danger.
Alors que l’autre, l’ouvrier, le salarié, qui n’a que sa force de travail, ses compétences et son talent en bien propre, qui donc est le plus démuni en bien matériel, n’a rien à défendre pour beaucoup de commentateurs. Sauf son emploi. Mais son emploi il n’en est pas le maître et créateur et on pense le plus souvent qu’il le doit à son employeur. Ainsi lorsque cet emploi est menacé, il est en définitive du devoir du salarié d’accepter la précarité dans laquelle il se trouve. Telle est l’assignation dans laquelle on veut mettre le salarié : Accepter les conditions qui lui sont imposées.

La violence s’oppose aux valeurs que nous défendons et nous devons la bannir comme moyen de régler les conflits.
Mais comment faire ?
Et suffit-il de répéter sans cesse l’expression à la mode « vivre ensemble », comme on le fait quotidiennement. Dire chaque jour « vivre ensemble !, vivre ensemble ! », ne règle rien bien au contraire, car cette expression a de quoi énerver beaucoup de nos concitoyens de plus en plus nombreux qui de fait se sentent ou sont réellement exclus ou le seront dans un proche avenir. L’expression vivre ensemble devient alors une formidable hypocrisie, un masque qui cache de grandes inégalités.
Ce vivre ensemble reste encore largement à construire. Et nous pourrons construire un vivre ensemble harmonieux et pacifié que s’il est fondé sur la justice et l’égalité.

Y a-t-il des critères moraux à la violence ?
Y a-t-il une violence juste ?
Voilà une des plus grandes difficultés auxquelles nous sommes confrontées.
Pourtant, il est courant de penser que lorsque les principes du droit naturels et ceux des droits de l’homme sont bafoués, et qu’aucune autre solution ne se présente, la violence peut être légitime. Et l’estimation de la valeur de ces principes laisse une place importante à la conscience individuelle de chacun.

François Baudin



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