L’année dernière au mois d’avril,
François Hollande avait élevé la lutte pour l’emploi au rang de « cause
nationale ». C’est probablement au nom de cette cause qu’au cours de la
dernière période, le président français a renforcé son tournant libéral et
accédé aux revendications des entreprises en baissant les charges sociales et
familiales sur les salaires.
Or cette idée que la baisse du
coût du travail entraîne la création d’emploi est une idée fausse. Le coût du
travail intervient de moins en moins dans le calcul de la valeur et dans le
prix de vente des produits. Par exemple il ne représente que 5 à 8 % du prix d’une
automobile chez Peugeot. Ce n’est donc pas en diminuant les charges salariales
de quelques points qu’on créera des emplois.
Cette tendance vers la diminution
du coût du travail est due en grande partie aux progrès techniques et à la
modernisation des outils de production qui remplace de manière irrémédiable le
travail humain. C’est une réalité historique qu’aucun économiste ne peut nier.
Les causes profondes du chômage
en France et de son augmentation ne sont pas à trouver dans le coût du travail.
D’ailleurs les entreprises le savent pertinemment. Et de leur point de vue, il
serait très risqué de promettre des emplois contre des baisses de charge comme
le souhaite François Hollande dans son pacte de responsabilité.
En revanche si cette baisse des
charges patronales a pour conséquence d’augmenter la rigueur pour tous, car il
faudra bien trouver ailleurs les sommes redonnées aux entreprises, le risque
est grand de renforcer encore la crise sociale, et notamment la pauvreté en
France.
Il y a deux jours François
Chérèque, l’ancien leader de la CFDT a remis un rapport sur la pauvreté dans
notre pays. Près de 9 millions de personnes,
soit presque 15% de la population, vivent en dessous du seuil de pauvreté. Le
nombre de pauvres en France augmente sans cesse depuis plus de quinze ans,
notamment parmi les jeunes de 18 à 29 ans et les familles monoparentales.
Depuis 40 ans la productivité du
travail dont on ne parle jamais, a fait des pas de géant. C’est cette
augmentation de la productivité qui est en fait la cause principale des
difficultés économiques actuelles. Le progrès technique entraîne de fait une
diminution très importante du nombre nécessaire d’heures de travail pour
produire la même quantité de richesse.
Cette productivité est le signe
évident d’un progrès qu’il faut encourager. Il est alors nécessaire de partager
le travail. D’ailleurs ce partage est en cours actuellement, mais il s’effectue
de manière sauvage, non régulé, au détriment des salariés. La durée moyenne du
travail est d’à peine 30 heures si on compte les salariés en temps partiel. Si
on compte les demandeurs d’emploi elle descend à moins de 25 heures par semaine
pour produire autant de richesse.
C’est donc l’inverse qu’il faut
faire. C’est vers la réduction du temps de travail qu’il faut aller. Bien sûr
cette réduction ne peut pas se mettre en place dans le cadre économique actuel.
Mais elle est nécessaire. Elle est le levier le plus puissant dont nous
disposons pour sortir du chômage et de la pauvreté.
Pour continuer de voir dans le
travail une source essentielle de la réalisation personnelle, ne faut-il pas
que tout le monde y ait accès ? Pour cela il faut revoir notre modèle de
développement et redéfinir notre conception du progrès.
Il faut revenir aux fondamentaux
et répondre à cette question simple : à quoi sert l’économie ? Elle
sert à satisfaire nos besoins, et pas à satisfaire des marchés. Il est
aujourd’hui nécessaire de passer à un nouveau mode de développement qui donne
la primauté à l’homme. Il faut concevoir et inventer collectivement une
économie solidaire de partage, plus social et plus écologique.
François Baudin
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