samedi 16 mai 2015

La démocratie mise en examen. Conférence donnée à Vandoeuvre le 16 mai 2015


Il n’y a pas une journée sans que le mot de crise soit prononcé.
Crise économique, crise sociale, crise des valeurs, crise éthique, crise morale et aussi crise de la démocratie.
Le mot crise, répété à longueur d’articles, est dans tous les esprits.
Mais si on observe ce qui se passe, on s’aperçoit très vite que cette crise n’est pas partagée par tous, car un peu partout dans le monde et notamment en France, la crise, qu’elle soit économique, politique ou sociale semble profiter à une minorité de privilégiés, de plus en plus minoritaire d’ailleurs et de plus en plus privilégiés, qui dominent le monde, s’enrichissent encore et toujours, et vivent en définitive des jours heureux. Actuellement dans le monde 67 personnes possèdent autant de richesse que trois milliards et demi d’êtres humains. Le patrimoine des 1% les plus riches dépasse celui des 99 % restants.

Le système démocratique en vigueur dans nos pays occidentaux n’est-il alors pas là pour que cette minorité poursuive sa domination ?
Aujourd’hui plus qu’autrefois, la démocratie est mise en question, mise en examen.

S’il y a crise, le moins qu’on puisse dire c’est qu’elle touche plus certains que d’autres. La question que l’on se pose alors est celle de la démocratie dont une des conséquences serait de maintenir, voire de développer cette tendance monstrueuse vers l’inégalité.

Depuis les tueries de Charlie hebdo et de la porte de Vincennes début janvier, ce constat est encore plus évident : une période de doute, de questionnement s’est ouverte cet hiver 2015.
L’unanimisme du slogan « Je suis Charlie » est battu en brèche et la brèche laisse apparaître aux yeux de tous une énorme béance.
Le doute s’est emparé des esprits. Car si beaucoup se sont reconnus dans ce slogan ambigu (« Je suis Charlie »), beaucoup d’autres très nombreux et qui ne sont pas des terroristes, ne s’y sont pas reconnus et ne pouvaient pas s’y reconnaître.
Pourquoi ?
Parce que la démocratie, la République, qui voulait se rassembler lors des manifestations du 11 janvier, qui voulait donc rassembler ses enfants, avait depuis longtemps exclu une partie de ses enfants, les avaient ignorés, les avaient stigmatisés, les avaient déjà ghettoisés depuis longtemps. Ce rassemblement du 11 janvier est donc apparu ensuite à celui qui réfléchit, comme une gigantesque manipulation orchestrée par une oligarchie restreinte, très restreinte, qui n’est motivée que par le maintien de sa domination fondée sur l’exclusion.
Il ne faut pas oublier que rarement en France, le pouvoir en place appelle à manifester comme il l’a fait cet hiver à Paris et dans toutes les villes de France. Les plus grands dirigeants de la planète, dont beaucoup de dictateurs qui n’ont que faire de la liberté d’expression, de l’égalité et de la fraternité, ont répondu à l’appel du gouvernement français et sont venus battre le pavé dans les rues de Paris pour « sauver » les valeurs démocratiques soi-disant mises en danger par les tueries de janvier.

Comment accepter une démocratie, une République qui exclut une partie de ses enfants ?
Que ces enfants habitent au fin fond d’une région rurale désertifiée, dans une ancienne cité ouvrière laissée à l’abandon comme il y en a beaucoup en Lorraine, dans un quartier d’une périphérie urbaine mise au ban de la société.
Si on fait une analyse sociologique des manifestants du 11 janvier, il y manquait justement le monde rural, les petites villes désertifiées, les banlieues, les anciennes cités ouvrières livrées à l’abandon et au chômage. Il y manquait le peuple, au moins une partie du peuple de France.

La France, la République et ses principes, la laïcité et aussi la démocratie, toutes ces évidences se fissurent et fragilisent notre socle démocratique.

Qu’est ce que cela veut dire ?
Le système démocratique que nous connaissons, dans lequel nous vivons depuis des décennies, notre système fondé sur l’élection de nos représentants, sur le suffrage universel, semble ne plus répondre aux questions qui sont devant nous.

La démocratie au sens premier du terme c’est la capacité des hommes à s’organiser pour pouvoir vivre ensemble. La démocratie c’est le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple.

Aujourd’hui il apparaît clairement que ce système est là pour reproduire une oligarchie, une « élite » qui en réalité n’a que faire du peuple.
Le système prétendument démocratique avec ses rites électoraux, n’est-il pas en définitive le paravent d’une totale vassalisation de la politique par une oligarchie ?

Ma première expérience politique a été Mai 68. En Mai 68, des millions de Français mais aussi déjà des immigrés, ont occupé les usines, les bureaux, sont descendus manifester quotidiennement dans les rues, se sont unis avec les étudiants qui eux aussi manifestaient.
Cette première expérience politique, d’une telle intensité, vous ne pouvez pas l’oublier, elle vous marque pour une vie entière.
Partout en 68, jusqu’aux endroits les plus reculés du pays, les habitants se sont rassemblés, ont discuté, rêvant d’un autre monde possible.
Jamais un tel évènement n’avait eu lieu depuis bien longtemps. On se rappelait des grandes heures de l’histoire : la libération de la France en 1944, les grèves de 1936, la Commune de Paris en 1871, et la période révolutionnaire en 1789.
Face à cette contestation globale de la société, le pouvoir gaulliste en place a dissous l’Assemblée nationale et appelé à de nouvelles élections.
Ainsi les premières affiches que j’ai collées sur les murs et dans les rues dénonçaient cette manipulation pseudo démocratique. Le slogan des manifestants de mai était : « Election piège à cons ».

Comment voulez vous qu’une élection non préparée, rapidement mise en place, puisse résumer ce qui s’était passé en Mai ? Comment voulez-vous que des élections hâtivement programmées puissent répondre à l’espoir porté par les évènements de Mai ? On voulait réduire Mai 1968 à un rite électoral ridicule.
Et bien entendu le pouvoir en place a été reconduit par une majorité écrasante de votants. De Gaule avait dit un jour « Les Français sont des veaux ». Et des veaux ça doit voter. Jamais le parti gaulliste n’a recueilli autant de voix qu’aux élections de juin 68.
L’élection au suffrage universel en juin 1968 a été une formidable manipulation pour étouffer ce qui avait été Mai 1968. Pour recouvrir l’espoir qu’avait été Mai 1968.

Dernièrement la même opération de recouvrement, de nappage, s’est passée en Egypte qui a vécu à partir du 25 janvier 2011 et pendant des semaines, un extraordinaire mouvement populaire contre la dictature du Président Moubarak. La convocation à des élections si rapidement mises en œuvre et soutenues de manière pressante par les Etats-Unis, et donc impréparées, n’a rien changé à la situation égyptienne. C’était même le but presque avoué de ces élections : faire qu’en définitive rien ne change.
Les choses étaient quasiment écrites d’avance en Egypte : ces élections donneraient le pouvoir aux Frères musulmans absents de la place Tahrir, mouvement politique absent de la révolution démocratique égyptienne. Les Frères musulmans installés au pouvoir par les élections furent chassés ensuite par cette même place Tahrir, pour redonner en définitive le pouvoir aux militaires du général Al Sissi, ancien compagnon de Moubarak. La révolution égyptienne est devenue une révolution de type galiléen : un retour à la situation initiale.

Quelle leçon tirer de ces deux évènements historiques (Mai 68 et printemps égyptien qui, je l’espère, n’est pas terminé) ? : Que les élections qui s’appuient sur le principe majoritaire ne détient pas la vérité. La majorité, le nombre n’a jamais fait la vérité, ni la justice. La plupart des dictatures sont arrivées au pouvoir grâce aux élections et ont été reconduites ensuite massivement.
La vérité, la justice, l’aspiration démocratique sont souvent, même très souvent, un fait minoritaire. Si les Français avaient pu voté en juin 1940 et peut-être même jusqu’en juin 1944, ils auraient probablement voté en grande majorité pour le Maréchal Pétain. Les résistants français étaient minoritaires et pourtant c’est eux qui portaient l’histoire.


Est-ce à dire que la démocratie doit être rejetée comme principe de gouvernement ?
Non, bien entendu. Et la plupart des contestations sont démocratiques.
Les Résistants français pendant l’Occupation, les manifestants de la place Tahrir, les manifestants de Mai 68, les « indignés » qui occupèrent les places à New York ou Madrid en 2011 et 2012 et qui dénonçaient la finance internationale, étaient et sont toujours animés par un idéal démocratique. 
Mais la démocratie ne se résume pas à l’élection, même lorsque cette élection est au suffrage universel.
Il existe d’autres formes de démocraties. Et si les manifestants, les « indignés », les contestataires descendent dans les rues, c’est parce qu’il veulent plus de démocratie et estiment qu’ils vivent dans une démocratie de très basse intensité.

Mais devons nous pour autant rejeter la démocratie représentative ?
Non plus.
Pourtant notre système de démocratie représentative est en crise.
Pourquoi ?
Parce que le lien de confiance entre les représentants et le peuple, s’il a pu exister à certaines époques, est largement rompu actuellement.
Cette rupture se manifeste par le taux élevé d’abstention, 50% et plus, taux d’abstention qui touche toutes les démocraties occidentales, par l’augmentation du vote d’extrême droite dans tous les pays d’Europe, vote qui met en danger nos démocraties.

On peut lister les raisons, les causes qui font que ce lien de confiance entre le peuple et ses représentants, ou entre les peuples et les nations démocratiques n’existe plus : (cette liste n’est pas exhaustive). On peut retenir que :

-         1 Les politiques répondent rarement aux véritables besoins des populations.

-         2 La plupart des promesses électorales ne sont pas tenues. Un homme politique de premier plan (Jacques Chirac pour le nommer) a même été jusqu’à dire qu’une promesse électorale était faite pour ne pas être tenue. Qu’elle n’engageait que celui qui l’écoute.

-         3 L’impuissance actuelle et avouée du politique, à résoudre les difficultés rencontrées. Le fait de répéter sans cesse qu’on ne peut pas faire grand-chose, que les réalités sont là et qu’il faut en tenir compte : tout cela donne l’impression ou plutôt confirme le fait que les politiques ne sont là que pour gérer au mieux un système qui se perpétue. Quand un homme politique, un élu, explique qu’il y a des réalités et qu’il ne peut pas faire grand-chose face à ces réalités, n’avoue-t-il pas son impuissance due à sa non volonté politique ? Et finalement avoue son accord sur l’essentiel. En justifiant la réalité actuelle, il justifie la situation. Les élus deviennent alors de simples opérateurs de gestion. D’ailleurs le mot nouveau de gouvernance l’indique bien. Eliminons ce concept de gouvernance du vocable politique pour le remplacer par souveraineté populaire et gouvernement.

-         4 Le modèle élitiste qui perdure d’élections en élections avec l’impression que le système démocratique n’est qu’un paravent pour maintenir toujours les mêmes au pouvoir et en définitive maintenir les inégalités monstrueuses produites par ce système.

-         5 Le rôle des médias de masse dans cette perpétuation. Alors que les médias devraient être un outil pour la démocratie, leur responsabilité est immense face à l’impasse dans laquelle la démocratie se trouve.

-         6 Le poids des « experts » dans les décisions. Ce poids est si grand qu’on a pu parler de république des experts. Experts qui passent alternativement et héréditairement un peu comme une transmission dynastique, de la grande administration d’Etat, au secteur privé pour revenir à la politique. Les mêmes tournent, pantouflent, s’enrichissent, votent des lois et héritent de privilèges.

-         7 Les lobbies qui manoeuvrent en permanence pour empêcher toutes décisions allant contre leurs intérêts particuliers. (le lobby bancaire, celui des industries pharmaceutiques, des entreprises multinationales…).

-         8 Les scandales qui émaillent en permanence la vie politique et ronge la vie démocratique. Ces scandales font penser que la motivation première de nos représentants est l’enrichissement personnel.

-         9 Le sentiment que le peuple est absent et très éloigné des décisions et laissé dans l’ignorance. On peut donner trois exemples récents :
§        la loi sur le renseignement qui n’a pas été précédée d’un véritable débat sur les enjeux de la sécurité et de la surveillance généralisée en France,
§        celui plus ancien de notre intervention en Libye qui n’a jamais été discutée par la représentation nationale, alors que nos avions ont effectué plus de 4000 sorties aériennes, qu’ils ont contribué à détruire un pays et changé radicalement le cours de l’histoire dans cette région du monde,
§         enfin le troisième exemple est celui de Tafta, cet accord commercial entre les Etats-Unis et l’Europe qui se négocie actuellement dans le plus grand secret. Pourquoi ce secret ? : parce que cet accord se fera contre l’intérêt des peuples américains et européens et dans le seul intérêt des industriels et du commerce mondial.
- 10 L’hypocrisie qui consiste à prétendre que la démocratie telle qu’elle est pratiquée par les grandes puissances occidentales, rime avec paix, comme l’avait écrit Alexis de Tocqueville au XIXe siècle. En fait la volonté de puissance, la volonté hégémonique sur le monde des pays dits démocratiques s’est soldée en permanence par des guerres dans le monde.

Dans ces conditions, la défiance vis-à-vis des élus va en grandissant et la démocratie représentative semble être une illusion de démocratie, un ersatz de démocratie, une vaste hypocrisie que les grands médias perpétuent. Un peu comme les clercs de l’Ancien régime perpétuaient le système inégalitaire en place depuis des siècles. La démocratie parlementaire inventée au XIXe siècle, telle que nous la connaissons encore aujourd’hui, est à bout de souffle comme l’Ancien régime l’était en 1788.
Aujourd’hui la rupture entre le peuple et ses représentants semble consommée. Peuple qui pense de plus en plus que les élections ne sont là que pour maintenir un système injuste.

La question actuelle se résume ainsi : est-ce que la démocratie représentative telle que nous la vivons répond aux aspirations démocratiques du peuple ?

L’illusion démocratique s’est encore accentuée au cours de la dernière période après l’élection de Syriza en Grèce, en butte à des grandes difficultés. Les gouvernements européens ont dit clairement qu’ils ne tiendront aucun compte des résultats des élections de janvier 2015 en Grèce. Qu’ils feront tout pour que les réformes programmées par Syriza ne puissent pas être mises en œuvre. Le bras de fer engagé par les gouvernements européens au service des intérêts financiers, pour faire plier la Grèce, est dramatique. Ce petit pays devra céder, se plier au diktat de la finance, capituler ou disparaître du concert des nations. Voilà l’enjeu. Voilà le mépris aussi. Et c’est le même mépris pour les résultats d’un vote lorsqu’il ne va pas dans le sens souhaité, mépris que nous avons nous-mêmes vécu en France, lorsque par le traité de Lisbonne, les dirigeants européens, Nicolas Sarkozy compris, ont imposé à la France et à tous les pays partenaires, le projet de traité constitutionnel qui avait été refusé par référendum.


II
Le réquisitoire contre la démocratie représentative est dur, très dur, mais il correspond hélas à la réalité que nous vivons.
C’est bien la démocratie parlementaire qui fait problème aujourd’hui. Qui apparaît comme un problème que le peuple doit résoudre.
Et ceux qui sont censés nous représenter doivent prendre conscience qu’ils ne nous représentent pas.

Alors quels sont les chemins qui nous permettront de sortir de ce mauvais pas. De rétablir l’espoir qu’a pu représenter un jour le suffrage universel.
Ici, nous ne pouvons que dessiner quelques pistes de travail. Et c’est justement par des débats, des échanges comme celui-ci que nous trouverons ensemble les moyens de changer les choses en la matière.
C’est en multipliant ce genre d’initiatives, en créant et dynamisant la vie associative un peu partout que la démocratie se revitalisera. Les associations et des conseils citoyens doivent pouvoir devenir des interlocuteurs des Institutions. La démocratisation des institutions passe par la vie associative. Faire entrer cet espace associatif où se trouvent des citoyens, dans l’espace institutionnel et décisionnel, et ceci jusqu’au plus haut niveau, est nécessaire pour une démocratie véritable. D’ailleurs ce phénomène est actuellement en cours : je prends l’exemple de l’association Anticor qui lutte contre la corruption et qui en 2012 a obtenu l’agrément du ministère de la Justice pour se constituer partie civile dans les affaires de corruption et qui est reconnu de plus en plus comme un interlocuteur des politiques. Ce n’est évidemment qu’un début.

Par le développement de la vie associative, nous pourrons dégager un nouveau mode de représentation, sans laisser tomber l’ancien fondé sur l’élection. Cela est possible immédiatement dans le cadre d’une commune, d’un département ou d’une région. Cela est envisageable au niveau d’un pays.

Un moment de bouillonnement, de créations multiples est nécessaire. Et il faut tout faire pour favoriser ces instants de rencontres, d’échanges. Car de ce terreau va naître des idées, d’autres initiatives, d’autres manières de vivre ensemble qui se concrétiseront dans de nouvelles organisations politiques et citoyennes.

Il faut affirmer qu’il y a actuellement une aspiration profonde à une autre vie démocratique. Le temps où certains se prétendent être l’élite de la nation face à une masse ignorante et incapable, masse silencieuse (majorité silencieuse comme on disait autrefois), est révolu. Le temps de la séparation et de l’opposition entre l’Etat, ses institutions et l’ensemble de la société est en voie d’achèvement. Un Etat séparé des gens et même parfois exerçant son pouvoir de répression sur les gens est en voie d’extinction. Je pense à terme au dépérissement de l’Etat et à la mise en place d’un régime de libre association.

Ce changement notable des mentalités est dû en grande partie à l’apparition de nouveaux moyens de communications, d’Internet, qui favorise à l’infini les échanges, la communication. Et cela de manière horizontale. Le savoir, l’information ou la désinformation, se diffusent de plus en plus de manière horizontale et non plus verticale.
Ce phénomène nouveau et massif d’échanges entre tous, et d’organisations nouvelles, rend la démocratie représentative, c'est-à-dire le fait de transférer son pouvoir à un autre, obsolète, d’un autre temps. Un peu comme si cette forme représentative était maintenant à bout de souffle.
Et la société dans un avenir pas si lointain, sera capable de produire ses règles et d’inventer des institutions nouvelles.
Il faut donc radicaliser la démocratie et pour ce faire, ne rien attendre de ceux qui gouvernent mais ne compter que sur ses propres initiatives.

Parmi les réformes démocratiques immédiates à mettre en oeuvre citons :
§        la mise en place d’Etats Généraux en France
§        l’interdiction du financement privé de la politique notamment par les grandes entreprises
§        La mise en place d’un scrutin proportionnel
§        le contrôle des élus en cours de mandat
§        la suppression effective du cumul des mandats
§        la mise en place de référendum d’initiative populaire
§        la création de conseils citoyens
§        l’entrée des associations et de ces conseils dans le processus décisionnel
§        le contrôle associatif, politique et démocratique des médias, de leur indépendance…

Pour conclure je dirai que si le vote dans un isoloir organisé tous les cinq ans, devait changer quelque chose, cela fait longtemps qu’on l’aurait interdit. Le fait de voter ne suffit pas.
Une démocratie de haute intensité devient une nécessité pour nos pays.
Le meilleur régime politique et économique est toujours à venir. C’est possible.


François Baudin 

jeudi 14 mai 2015

Vive la Grèce !



Depuis des années la Grèce est présente dans l’actualité internationale. Ce grand peuple européen qui subit la crise financière mondiale comme aucun autre, compte parmi les créateurs de l’idée même d’Europe. L’Europe n’est-elle pas née il y a plus de 2500 ans en Attique, sur les rives de la mer Egée, en Crète, à Corinthe et Delphes comme sur le mont Olympe.
Nous devons tant à la Grèce, à son peuple, à son histoire, à ses textes philosophiques, son théâtre, ses mythes, sa langue, ses paysages…. Nous pourrions à l’infini dire notre dette vis-à-vis de ce pays, notre dette vis-à-vis de cette petite nation qui fut en quelque sorte la mère des nations.
Et depuis des années, les dirigeants européens ingrats, ignorants de leur propre histoire, bêtes et irresponsables, gestionnaires fidèles d’un système inégalitaire, ne cessent d’accuser ce petit pays et son peuple de tous les maux de la terre.
Ainsi les Grecs sont des fainéants, des menteurs, des dépensiers qui vécurent au dessus de leur moyen sur le dos des pays du nord. Le nord épargnant et travailleur, fourmi besogneuse, veut faire payer et punir le sud, cigale insouciante. La ficelle est trop grosse.
Depuis des années l’Allemagne soutenue par la France demande à la Grèce les bonnes réformes, ce qu’elle juge comme étant les bonnes réformes. La pression est énorme. Mais l’histoire comme elle sait nous le rappeler ne se passe comme prévu. Les Grecs ont mal voté en janvier dernier. Ils ont refusé l’austérité qui veut faire payer par le peuple ce que les dirigeants ont dépensé sans compter pendant des décennies pour le plus grand profit de la corruption, pour le plus grand profit des industries allemandes et françaises d’armements, de la chimie, de l’automobile ou du bâtiment, pour le plus grand profit des banques internationales qui aujourd’hui saignent littéralement le pays.
Le bilan des 5 années d’austérité en Grèce est terrible : appauvrissement généralisé de la population, 25 % de hausse du chômage, augmentation des inégalités, disparition de pans entiers de la société, écoles, hôpitaux, services publics, explosion de l’endettement et pillage du pays. Plus la Grèce se réforme selon les volontés des dirigeants européens plus elle s’endette, plus elle s’appauvrit.
Réforme, réforme : ce mot résonne à l’oreille des Grecs comme une condamnation à la pauvreté.
Mais le mot réforme ne veut rien dire en lui-même. On le sait.
Alors le nouveau gouvernement grec propose d’autres réformes. Un malentendu s’engage avec Bruxelles. Réforme ! Oui mais quelles réformes ? Celles qui poursuivent l’appauvrissement, le pillage, le chômage ou celles qui vont dans le sens d’une meilleure répartition de l’effort à fournir en réformant profondément la fiscalité. Réformes ! Oui, mais quelles réformes ? Celles qui proposent encore de supprimer le système de retraite et de protection sociale, de mettre à la rue des milliers d’employés et d’ouvriers, ou bien celles qui rétablissent des droits pour tous.
On voit bien que les enjeux des négociations actuelles avec les Grecs sont essentiels aussi pour nous, notre avenir et celui de nos enfants.
Et pour les dirigeants européens il est essentiel que les Grecs comprennent qu’il n’y a pas d’autre politique possible que celle engagée depuis des années. There is no alternative, avait dit Margaret Tatcher. Que les Grecs comprennent la réalité économique jusque dans leur chair.

Il est impérieux que les dirigeants européens démontrent que le vote des Grecs les a mis dans une impasse.
Les chefs des gouvernements européens ont dit clairement qu’ils ne tiendront aucun compte des résultats des élections de janvier 2015 en Grèce. Qu’ils feront tout pour que les réformes programmées par Syriza ne puissent pas être mises en œuvre. Le bras de fer engagé pour faire plier la Grèce, est dramatique. Ce petit pays devra céder, se plier au diktat de la finance, capituler ou disparaître du concert des nations. Voilà l’enjeu. Voilà le mépris aussi.
Notre avenir dépend de la réussite des Grecs.
Vive la Grèce

François Baudin

samedi 9 mai 2015

Une France sous surveillance


Suite aux attentats de janvier, le gouvernement a souhaité réformer la loi sur le renseignement en France qui datait de 1991. Un peu comme la réforme du Patriot Act américain avait suivi les attentats du 11 septembre 2001.
C’est ainsi qu’un projet de loi Renseignement a été adopté en Conseil des ministres le 19 mars dernier. Ce projet avance très vite actuellement, puisqu’il a été voté le 5 mai 2015 à l’Assemblée nationale par 463 voix contre 86, soit par une très grande majorité de nos députés. La loi va passer dans les jours qui viennent devant les sénateurs.
Cette rapidité dans la décision pose une grave question démocratique, car de très nombreuses associations de défense des libertés, comme Amnesty international ou la Ligue des droits de l’homme, s’opposent à ce projet.
Pourquoi ?
Parce que c’est l’ensemble de la population qui va de fait être surveillé.
Parce que des gens honnêtes vont forcément être surveillés, des gens comme vous et moi.
On pourra toujours répondre que les gens honnêtes n’ont rien à craindre car ils n’ont rien à cacher. N’oublions jamais que c’est ce même type d’argument qui prévalait en Union Soviétique autrefois. On pouvait surveiller tout le monde et celui qui n’avait rien à se reprocher, n’avait rien à craindre.
Certains principes de notre droit comme l’inviolabilité du domicile, le secret de la correspondance (électroniques ou par lettre), la préservation de la vie intime, ne sont pas abstraits.

Selon Jean-Marie Delarue, l'actuel président de la commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, le difficile équilibre entre exigence de sécurité et libertés individuelles est mis à mal par cette loi. D’après lui, il faut continuer de s’y opposer.

Quels sont les dangers concrets contenus dans cette loi ?
Par ce projet le gouvernement souhaite légaliser des pratiques illégales de surveillance.
La loi élargit la population qui peut être surveillée par rapport à celle visée par les interceptions de sécurité. Le risque est grand de voir chaque citoyen français devenir une cible potentielle.
Alors qu’auparavant la loi précisait que ces interceptions étaient réalisées à titre exceptionnel, les motifs pour lesquels on pourra être écouté sont élargis, puisqu’on y met désormais la politique étrangère et l’exécution des engagements européens et internationaux. Or nous sommes tous amenés un jour ou l’autre à devoir nous opposer, ou même à être ami avec quelqu’un qui s’oppose, à la politique étrangère de notre pays, ou s’oppose à un engagement commercial ou européen de la France.

Enfin c’est l’emploi de techniques de captation des données qui pose un sérieux problème pour les libertés. La nouvelle loi prévoit que les agences de renseignement seront autorisées à pirater les ordinateurs et pourront espionner les communications de toute personne ayant été en contact, même par hasard, avec une personne suspecte. La loi prévoit en outre que ces mêmes agences pourront réaliser ces opérations sans devoir obtenir d’autorisation judiciaire.
Cette loi liberticide constitue une grave atteinte à la vie privée des citoyens, comme des journalistes ou des militants associatifs travaillant sur des sujets considérés comme sensibles par le pouvoir en place.
Nous ne pouvons accepter que la sécurité se fasse au détriment des droits et des libertés individuelles.
La lutte contre le terrorisme ne doit pas mettre à mal la liberté de tous et la citoyenneté.


François Baudin