vendredi 19 mai 2017

Les masques vont tomber



En mai 2017, face à la crise globale, les élites qui dirigent la France ne peuvent plus se satisfaire d’un système d’alternance « gauche » / droite qui a dominé pendant des décennies. Cette alternance a pu pendant longtemps donner l’illusion d’un changement possible grâce à des élections permettant à des espérances et des mécontentements de trouver un débouché dans les urnes.
C’est ainsi que la démocratie parlementaire telle que nous la connaissons dans le monde occidental depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale s’est mise en place pour durer très longtemps. Dans presque tous les pays d’Europe et aussi en Amérique du nord : deux partis dits de gouvernement ont dominé les différentes scènes politiques.
Démocrates et Républicains aux Etats-Unis, Sociaux-démocrates et Démocrates chrétiens en Allemagne, Labour Party et Conservateurs en Angleterre, etc, etc.
Et puis soudain ce système qui pouvait donner l’illusion d’un changement démocratique s’est mis à déraper un peu partout. Sur les marges, des groupes plus radicaux sont apparus qui mettaient en danger le système lui-même.

Pourquoi ?

Parce que quel que soit le résultat des urnes, ce qu’on appelle les réalités économiques et sociales imposent leurs prérogatives. Donc dans la plupart des cas les promesses électorales ne pouvaient pas être réalisées, et restaient à tout jamais des promesses qui n’engageaient pas celui qui les avaient tenues. Des experts nous disent et nous répètent chaque jour que rien n’est possible. L’impossible domine et pénètre dans nos esprits. Dans un monde totalement interdépendant, on ne peut rien faire et la politique n’est là que pour intervenir dans les marges et gérer au mieux les réalités qui nous tombent dessus un peu comme des calamités naturelles. Les réalités aujourd’hui se nomment chômage de masse, licenciements, fermetures de sites industriels, abandon de territoires entiers, inégalités monstrueuses dans le monde et notamment en France, etc, etc.
Le fameux concept de gouvernance a remplacé l’idée de gouvernement. La gouvernance nous dit que rien n’est possible et qu’il faut piloter le navire au mieux. L’idée de gouvernement est bien différente ; elle nous dit l’inverse elle dit tout simplement qu’il est possible de changer une réalité.
Donc face à la menace de voir balayer dans les urnes cette idée d’alternance parlementaire impuissante, qui de fait ne correspond à aucun changement véritable mais vise à la poursuite de ce qui existe déjà, l’élite qui gouverne véritablement le pays a inventé un homme nouveau. Homme providentiel, nouvel artiste de la politique qui donne l’illusion de créer du neuf alors qu’il ne pourra que poursuivre l’ancien mais avec un vernis plus brillant. L’oligarchie économique a trouvé son candidat en Emmanuel Macron qui a pu à la faveur de la montée de l’extrême droite s’ériger en sauveur de la République.
L’idée de cet homme est de rassembler et d’unir en une seule offre le libéralisme économique tel qu’il domine actuellement et le libéralisme culturel défendu par la gauche de gouvernement. Ce libéralisme unifié trouve son expression la plus accomplie dans les traités économiques internationaux, tel TAFTA et aussi dans les traités européens. Traités qui mènent à la ruine de l’idée européenne. Face à la menace politique qui plane un peu partout, la gauche et la droite sont dans l’obligation de s’unir sur l’essentiel : faire bloc afin de poursuivre ce qui est.
Pour arriver à ces fins, Emmanuel Macron doit passer par la case destruction des anciens partis traditionnels. Ce qu’il fait actuellement.
Cette stratégie n’est pas sans danger, car si elle réussit, le masque hypocrite d’une pseudo alternance parlementaire va tomber. Et l’élite qui dirige véritablement n’aura plus qu’un seul visage. Le sien qu’on pourra facilement identifier. Il s’agira alors d’une véritable clarification.

François Baudin  

jeudi 11 mai 2017

Le piège de l’élection

Parfois, il vaut mieux rester silencieux quelque temps au moment des élections. Quand la situation est telle que toute prise de position entraîne une confusion, un malentendu.
Beaucoup, et j’en suis, se sont sentis pris dans un piège, un peu comme si tout l’horizon, ou même toute espérance, avait été bouchée par l’échéance électorale.
Quoique nous fassions, quoique nous disions, nous étions prisonniers.
Heureux ceux qui avaient les idées claires, heureux ceux qui croyaient à leur vote.

Est-ce qu’une démocratie véritable, est-ce que la politique se résume à 5 minutes dans un isoloir tous les 5 ans, alors qu’il nous était rappelé journellement que le destin de la France s’y jouait irrémédiablement ?
Le destin d’un pays tout entier peut-il être décidé en quelques secondes à travers des petits papiers où deux noms apparaissent, dont un largement inconnu il y a à peine une année ?
Est-ce être un citoyen actif que de se satisfaire de cet ersatz de démocratie ?
Est-ce démocratique que de devoir remettre son destin et celui de son pays à une femme ou à un homme providentiel. Il n’est pas de sauveur suprême, nous dit la chanson.

Le choix pour un très grand nombre ne pouvait être qu’une négation. Un refus. Voilà le piège de l’élection : être le petit poisson dans un filet, Chaque geste, chaque mouvement nous enferme encore un peu plus et nous emporte vers la disparition.
Alors pour un grand nombre d’entre nous, le mieux était de ne pas bouger, de ne pas se rendre dans les urnes. Ou bien d’y mettre un bulletin blanc ou nul.

Il ne faut pas oublier que la démocratie est une affirmation.
L’affirmation d’un autre monde pour lequel on s’engage. La démocratie c’est le débat, l’échange réciproque de tous avec tous.
L’affirmation démocratique ne peut se satisfaire d’un système électoral où il suffit de se rendre seul à échéances régulières dans un endroit particulier, afin d’y remettre son propre pouvoir sans garantie. L’isoloir est souvent le lieu de la démission démocratique.

Heureux et naïfs aussi sont ceux qui ont cru affirmer quelque chose à travers leur vote.
La plupart a voté par défaut et c’est comme si cette élection leur avait été volée.
Peut-on continuer ainsi et vivre en permanence dans le refus ? Jamais un refus ne pourra affirmer quelque chose. La négation porte la négation.
  • Le refus d’un régime autoritaire fondé sur l’exclusion, le repli, la fermeture, la peur et parfois même la haine de l’autre.
  • Le refus d’une mondialisation telle qu’elle se révèle actuellement : libérale, sauvage, violente pour le plus grand nombre, où l’individualisme règne et où le seul critère de réussite pour l’humanité est l’enrichissement personnel. Un monde contemporain qui laisse sur le bord du chemin des milliers et des milliers d’individus.

Pour ceux qui ne veulent ni d’un monde haineux et replié sur lui-même, ni d’un monde dominé par l’argent et l’individualisme, aucune voie nouvelle ne leur était proposée.
Le système démocratique en vigueur a montré au cours des dernières semaines ses limites. Il est rare dans l’histoire que des élections accouchent d’un véritable changement.
Ceux qui ont affirmé et voulu quelque chose de positif dans ces élections risquent d’être à nouveau déçus dans les années à venir.

François Baudin