Les biens nommés "343 salauds".
Une proposition de loi contre la prostitution est actuellement en cours de
rédaction au parlement. Elle vise à défendre la dignité de la personne humaine et
va bien au-delà des clivages politiques habituels puisqu’elle est soutenue par des
hommes et des femmes de droite et de gauche.
Il s'agit de « lutter contre
les réseaux mafieux de la traite humaine », « épargner aux jeunes
l'entrée dans la prostitution », « accompagner les personnes prostituées
et les aider à en sortir » ; et surtout, et ce qui est nouveau, elle propose de responsabiliser les clients et d’interdire « l'achat
d'un acte sexuel», en créant une amende de 1.500 euros pour tout client d’une
prostituée. Le délit de racolage public serait abrogé.
Ce texte est donc très novateur
et courageux car il renverse la position traditionnelle du législateur qui
sanctionne la prostituée et dédouane le client.
La prostituée est ainsi
considérée comme une victime, ce qu’elle est en fait, alors que le client est
enfin culpabilisé. Le texte se fonde donc sur une conception de la dignité de
la personne humaine face à la violence que constituent la traite des êtres
humains et la prostitution.
Cette semaine, une pétition a circulé : intitulée « Touche pas à ma pute ».
Elle a été signée par quelques personnalités hyper médiatisées qui se
qualifient eux-mêmes de « salauds », et revendiquent le droit d’aller
voir des prostituées sans être pénalisés par la loi.
Cette pétition a provoqué un véritable scandale en France.
Qu’est ce qu’un « salaud » ?
Il est difficile de dire de quelqu’un que c’est un salaud. Car qui peut
juger, qui est en droit de juger ?
Le « salaud » est un homme méprisable, moralement répugnant,
motivé par son unique intérêt et prêt parfois à commettre les pires choses pour
arriver à ses fins.
Mais cette définition du salaud n’est pas suffisante, car en plus d’avoir
un comportement inacceptable, le salaud
selon Jean Paul Sartre se caractérise par le fait qu’il est conscient de ses
actes et les revendique en toute liberté, et après y avoir réfléchi décide de manière responsable et assumée de les promouvoir, d’en faire une
règle de vie.
Le vrai salaud alors n’est pas celui qu’on désigne, mais il est celui qui
s’affirme comme tel.
Ce type d’individu est rare, car dans la plupart des cas, les gens
cachent aux autres leurs turpitudes, leurs actes moralement répréhensibles.
Mêmes s’ils ont conscience d’être peu recommandables sur certains points de
leurs actes, ils ne peuvent les revendiquer.
Dans le cas de la prostitution, les personnalités qui revendiquent haut
et fort le fait d’être des clients sont donc réellement des salauds, ils le
savent et ils le disent.
Ils savent qu’ils contribuent à l’esclavage, qu’ils contribuent au trafic
de femmes, à la traite humaine. Rappelons qu’en France plus de 85 % des
prostituées sont de jeunes femmes venues contraintes et forcées.
Les femmes prostituées sont toutes originaires de pays très pauvres. Elles sont
arrivées en Europe par le biais d’organisations criminelles. Elles sont des « esclaves »
victimes de proxénètes ayant profité de leur vulnérabilité pour les tromper et
les placer sur les trottoirs dans des conditions particulièrement éprouvantes. Ces
mafias, réseaux et filières, sont généralement particulièrement violents, peu
scrupuleux et avides de gains rapides.
Cette forme d’esclavage, d’asservissement, n’est pas acceptable et il est
temps que les hommes qui en profitent et dont certains se considèrent eux-mêmes
comme des salauds, soient pénalisés.
François Baudin
Personnellement, j'ai trouvé deux article très intéressant sur le sujet, qui prennent des positions assez différentes de celle défendue par François, l'auteur de la chronique.
RépondreSupprimerL'article du journal le monde de Nathalie Heinich
Elle souligne que les questions de la traite de être humain et de la prostitution des mineurs sont déjà encadrées par la loi. La prostitution des mineurs est déjà pénalisée, et rappelle avoir proposé un encadrement de la prostitution.
L'autre article vraiment excellent m'a été conseillé par une amie féministe
il est écrit par Marie-Anne Paveau critique le manifeste et montre en quoi, rien ne tient debout dans ce morceau de prose signé par "des salauds"... et bien peu
dans les réactions qu'il a sollicitées. Elle critique entre autre dans sa conclusion la fause croyance que “la vertu ne sauvera pas les prostituées”,
Elle termine ainsi "C’est que le problème est ailleurs sans doute. De 1971 à 2013, le même problème se pose, qui n’est pas forcément d’ordre moral ou social, mais d’ordre politique-sexuel : que le corps des femmes (et des dominé.e.s, femmes étant ici pour moi une sorte de désignant générique de la domination) échappe au contrôle des hommes est toujours un point critique. Et les revendications des putes mettent le doigt [...] dans le chaudron du patriarcat, là où ça fait mal aux dominants.
les deux liens :
http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/11/07/prostitution-un-projet-de-loi-culpabilisant_3509371_3232.html
http://penseedudiscours.hypotheses.org/490
cordialement
Vincent