vendredi 11 octobre 2013

Enfer des pauvres et paradis des riches





« C’est de l’enfer des pauvres qu’est fait le paradis des riches », écrivait Victor Hugo dans L’homme qui rit.
La tragédie de Lampedusa n’a pas encore fini d’envoyer son message jusqu’à nous. Chaque jour de cette semaine le nombre d’Africains extraits du fond du bateau englouti, a augmenté ; et le drame est devenu insoutenable. Un drame mondial. Ils sont maintenant plus de 300 noyés dont 83 femmes et 9 enfants.
L’Europe rêvée par ces immigrés est un cauchemar, et les eaux bleues de la méditerranée sont devenues leur tombeau. Misère de l’immigration, émigration de la misère….

Selon des estimations, depuis 1999, plus de 200.000 migrants ont transité par Lampedusa. De nombreuses personnes y trouvent la mort régulièrement en cherchant à rejoindre cette île. L'an dernier, 500 personnes ont ainsi péri en mer. Mais il est d’autres endroits en méditerranée, Ceuta et Melilla enclaves coloniales européennes au Maroc, prisons pour Africains. 
On estime à 20 000 le nombre de morts devant les remparts de l’Europe depuis le début des années 90, dont peut-être 10 000 disparus en mer. On ne sait pas exactement. D’ailleurs qui s’intéresse véritablement à ces êtres humains dont la vie ne compte pas ?
Combien de morts devront nous atteindre pour qu’enfin une vraie réponse soit apportée par ceux qui dirigent les pays européens ?

Jusqu’à aujourd’hui seule une réponse de type policière est mise en avant. C’est la guerre qui est déclarée par les autorités. Cette guerre est menée par Frontex, une entreprise à moitié privée et donc à but lucratif. Guerre que cette agence européenne voudrait nous faire passer comme humanitaire. Guerre contre les pauvres, guerre contre les immigrés, contre les réfugiés qualifiés par les autorités d’illégaux ou clandestins, d’indésirables, pour mieux les stigmatiser et les combattre.
L’Union européenne a déclaré la guerre contre les pauvres du monde entier. Et le commissaire Barroso est venu cette semaine à Lampedusa pour nous le rappeler en augmentant les moyens financiers attribués à Frontex.
Comment nommer autrement que par le mot guerre, la mise en place de dispositifs destinés à repousser celles et ceux que la misère et les persécutions chassent de chez eux ?
Ainsi Frontex déploie ses navires, ses hélicoptères, ses avions, ses radars, ses caméras thermiques et bientôt ses drones en méditerranée, non pas pour sauver des vies humaines comme cette agence voudrait nous le faire croire, mais pour combattre toute incursion sur le territoire européen.
Comment nommer autrement que par le mot guerre contre les pauvres, la collaboration imposée par l’Europe à la Libye, l’Algérie, la Tunisie ou le Maroc – afin qu’ils jouent le rôle de garde-chiourmes. La méditerranéenne est une des zones les plus surveillées du monde où périssent pourtant des dizaines de milliers de personnes. Est-ce possible ?

Comment comprendre ce monde qui promeut la libre circulation des biens et pousse à la circulation incessante de la finance internationale, alors qu’il ferme ses frontières aux hommes et au femmes ? N’y a-t-il pas là comme un parfum de scandale ? L’homme vaut-il moins qu’une marchandise ?

Avons nous perdu le sens de la responsabilité fraternelle, demandait le pape François en juillet dernier à Lampedusa. Dans ce monde de la mondialisation, nous sommes tombés dans la mondialisation de l’indifférence.

Aujourd’hui il y a une nécessité urgente à faire cesser le pillage des richesses africaines fondé sur la guerre et la corruption, et urgence également à travailler au développement intégral de l’Afrique.
François Baudin

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