Peut-on
dire que pour les amoureux de la liberté, de l’égalité, de la fraternité,
l’année 2015 commence mal en France ?
Une
série événements survenus depuis début janvier semblent nous enfoncer peu à
peu dans une tragédie nationale. Mais si on regarde la marche du monde, cette
longue tragédie est déjà présente depuis des années au-delà de nos frontières
hexagonales.
Tout
d’abord le refus par un maire de la banlieue parisienne d’enterrer un jeune
nourrisson mort à deux mois et demi au lendemain de Noël. La famille rom de ce
petit enfant habitait dans un bidonville de Champlan, commune où elle vivait
sans payer d’impôts. Cette terrible discrimination jusque dans la mort a choqué
la France, à tel point que le maire de Champlan a dû s’expliquer, bien maladroitement,
et tenter de justifier l’injustifiable. L'indignation a été si grande que le
maire n’a pu ensuite que s’enfermer dans sa honte et le silence de sa
conscience.
Le deuxième événement a été la
parution du dernier roman de Michel Houellebecq dont le titre terrible « Soumission »
est déjà tout un programme. La sortie de ce livre a connu un battage médiatique
sans précédent durant plusieurs jours. Ce roman tiré à plusieurs centaines de
milliers d’exemplaires parle d’un soi-disant danger musulman qui guetterait la
France ; danger auquel notre pays allait irrémédiablement se soumettre. Dans
ce livre l’écrivain imagine une islamisation totale de notre pays et la venue
au pouvoir en 2022 d’un Président de la République de confession musulmane. On
a pu entendre tout au long du week-end dernier les élucubrations obscures de
cet homme semant la peur parmi la population.
Mais
on apprenait hier que suite à la tragédie de Charlie Hebo, Michel Houellebecq a
décidé de suspendre la promotion de son livre. Peut-être est-il devenu
conscient que son texte porte en lui un si mauvais vent qu’il est maintenant
préférable qu’il se taise et s’enferme, comme le maire de Champlan, dans le
silence de sa conscience ?
Enfin
depuis mercredi nous sommes tous sous le choc de la terrible attaque contre
Charlie Hebdo.
Que
l’on soit d’accord ou non avec ce que publiait Charlie, il est évident que
c’est la liberté de la presse qui a été attaquée ce jour. Car c’est bien
Charlie qui représente en France au plus haut point cette liberté. Charlie
depuis des décennies a été de tous les combats pour la démocratie, la liberté, la
justice sociale et contre le racisme. Le journal, plus que tous les autres, a
accompagné ces combats par ses dessins, ses articles, ses chroniques, même si
depuis plusieurs années, son impertinence a pu faire parfois bon ménage avec
les pouvoirs en place et avec ceux qui dominent la scène médiatique et la rendent
servile.
Personne
ne peut admettre qu’au nom d’une religion instrumentalisée, on puisse tuer Charlie
et la plupart de ses journalistes. Beaucoup vivent ce drame comme une blessure
personnelle. L’émotion qui a gagné le monde entier est juste.
Cependant
il ne faut pas oublier que l’unité et même l’unanimité que les médias en cette
fin de semaine présente ne reflètent qu’un aspect de la France. Prions et
faisons tout pour que cet événement et son unanime condamnation ne déclenche
pas une vague sans précédent d’islamophobie et de racisme. Pour que cet
événement ne déclenche pas la haine et ne nous précipite dans des affrontements
encore plus terribles. Que ces événements ne se soldent pas par la radicalisation
de quelques individus.
Nulle
part également on essaye d’analyser les causes de ce drame. Les causes
économiques et sociales qui font que des individus deviennent des assassins.
Et
d’analyser également les causes externes que constitue la politique
d’intervention mise en l’œuvre depuis des années en Afghanistan, en Irak, en
Libye... Interventions dont les conséquences sont terribles pour les populations
locales qui meurent par centaines de milliers.
Notre société n’est pas en guerre. Elle doit travailler sans cesse à la construction de la
paix et de la fraternité.
François
Baudin
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