vendredi 8 avril 2016

Debout jusqu'au bout de la nuit


L’homme debout est-il un veilleur qui annonce l’aube ? Qui l’attend, vigilant, dans la nuit, sur son chemin de ronde ?
Des millions d’hommes, probablement plus encore, gardent toujours l’espérance d’un autre monde possible. L’aurore d’une époque nouvelle préparée par leurs soins dans l’intimité de leur conscience, empêche ceux qui ne dorment pas de se coucher.
Le temps comme suspendu, l’heure de la délivrance encore en attente : nous sommes aujourd’hui le 37 mars nous disent les jeunes qui refusent la banalité du jour tissé de mépris, de mensonges, d’injustices.
Les communards en 1871 ont tiré sur les horloges dans Paris assiégés par Versailles, pour signifier l’arrêt du temps : un autre temps espéré par des milliers d’être humains, celui du vrai changement, devait naître au petit matin venu couronner la nuit blanche de son aube radieuse.

Que nous dit le mouvement naissant appelé la nuit debout. Il dit à ceux qui dorment toujours de leur petite mort, de se réveiller de leur torpeur, de ne pas se résigner, mais d’espérer malgré la narcose, malgré les paradis artificiels dans lesquels on veut les plonger. Il dit de construire un autre possible. Il dit la fraternité, l’espérance, la dignité.
Les jeunes sur les places disent qu’ils aiment la vie et la veulent belle.

Le temps des tentes est de retour sur les places de nos villes. La foule arrive. Le mouvement ne s’essouffle pas, mais prend de l’ampleur chaque nuit comme le feu pascal qui précède le jour de fête. Le jour nouveau. La lumière revenue. Chaque nuit réunit plus de monde que la veille. Chaque nuit de veille est une réinvention du monde.

La république, la démocratie, la fraternité : tout est à réinventer. Patience, courage et solidarité : voilà les mots d’ordre.

Ce projet de loi El Khomeri faussement intitulé loi travail, sera-t-il la goutte de trop qui réveille un pays ? Ce projet pourtant aura-t-il eu le mérite d’avoir réveillé la communauté des hommes, de l’avoir débarrassé, j’espère pour longtemps, de sa tentation identitaire, poison terrible, mortifère qui enferme chacun dans sa propre prison ?

Nul ne peut savoir ce qui va se passer, mais peut-être que chacun en chacune de ses nuits, en son cœur le plus secret, attend l’avènement d’un jour différent.

François Baudin


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